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Nouveaux infirmiers : sont-ils prêt à la pratique ?

Écrit par :

Olivier

Olivier

Service : Fondateur & Infirmier Urgentiste

Présentation :
Fondateur de la plateforme Smart Infirmier, Olivier a fait ses premières gammes aux Urgences Pédiatriques avant de prendre un poste en service d'Urgences complet. Séduit par la transmission des savoirs et par l'encadrement des étudiant.e.s infirmier.e.s, il essaye de transmettre la passion qui l'anime concernant les soins infirmiers !

3 ans d'études, des centaines d'heures de stage ... sommes-nous vraiment prêts une fois diplômés ?

La scène se répète encore et toujours. Il est 1h30 du matin, les alarmes des scopes sonnent sur des notes différentes, les infirmier.e.s réalisent leur dance synchronisée, bien que frénétique, auprès des patients.

Je venais d’être diplômé, j’avais choisi pour mon dernier stage le service d’Unité Post-Urgences, et celui s’était tellement bien passé que j’avais choisi de réaliser quelques missions d’intérim dans le même type de service mais dans différents hôpitaux.

Je pensais que j’étais prêt, mais j’ai été frappé par une dure réalité au cours des premières semaines de travail : je n’étais pas du tout préparé.

Un patient en particulier a mis ce fait en lumière :Je travaillais de nuit, et mon patient, Mr D était entré aux Urgences puis en Post-Urgences, suite à une décompensation de BPCO. Notion de chirurgie récente pour une tumeur.

Mr D a été mis sous assistance respiratoire en arrivant aux Urgences suite à la découverte d’un emphysème.

Cette nuit-là, sa tension artérielle et sa température ont lentement baissé. Sa peau était froide et moite, j’ai continué à surveiller de près ses signes vitaux. Sa tension artérielle oscillait au niveau d’une systole moyenne de 90 et sa température a chuté à 35,6°C.

Je me concentrais sur le fait de m’assurer que mes médicaments étaient administrés à temps et que j’effectuais toutes les tâches requises pour passer la nuit.

Le lendemain matin lors de la relève, l’infirmier qui a pris ma suite a été tout de suite intrigué par ces résultats :

Mr D développait un choc septique et j’ai été « réprimandé » pour ne pas l’avoir averti plus tôt dans la nuit. En manque de personnel, la personne supposée me doubler sur la nuit (je faisais un mois entier au même endroit) s’était vu confier ses propres patients et ne pouvait donc pas réaliser un encadrement de qualité.

J’ai quitté le travail ce matin-là en colère et contrarié de ne pas avoir reconnu ces signes subtils de septicémie plus tôt dans ma nuit de travail, alors que le délai de traitement a un impact significatif sur les résultats des patients.

Cette scène peut se dérouler dans les hôpitaux du pays et du monde entier.

Les nouveaux diplômés en soins infirmiers commencent leur carrière armés d’une quantité importante d’informations, mais peu ou pas de jugement clinique.

Une vision extérieure

Dans le récent rapport intitulé « Closing the Education-Practice Gap: Building Confidence + Competence« , la Docteur Anne Dabrow-Woods et Julie Stegman discutent des résultats du sondage sur la préparation des nouvelles infirmières mené par Wolters Kluwer.

Les auteurs affirment que les nouveaux professionnels diplômés ne sont pas entièrement préparées à la pratique en raison de « lacunes dans la pratique infirmière… attribuées à une communication inefficace, à la complexité de l’environnement clinique, au manque de connaissances sur les soins aux patients et au manque d’expérience de travail en équipe » (Dabrow -Woods & Stegman, 2020).

Ils poursuivent en affirmant que les étudiants doivent appliquer leurs connaissances, penser de manière critique et utiliser des preuves pour prendre de bonnes décisions cliniques (Dabrow-Woods & Stegman, 2020).

Et du coup, le rapport avec notre situation ?

A titre personnel, pour avoir encadré de nombreux étudiant.e.s, et endossé le rôle de tuteur dans un service, je retrouve beaucoup de choses transposables à la situation de nos étudiant.e.s ici en France.

Les Etats-Unis ayant de nombreuses années sur la France en terme de « Soins Infirmiers » (on peut dire beaucoup de choses sur le fait que la sécurité sociale soit pratiquement inexistante dans ce pays, et que les soins soient hors de prix), certaines habitudes que les hôpitaux ont pris me semblent transposables dans notre pays.

  • Développer un programme de transition afin d’aider les nouveaux professionnels à adapter leur pratique clinique
    • Le livret d’Accueil de l’étudiant est déjà bien en place, mais un livret d’Accueil du nouveau professionnel peut être un outil intéressant. Les deux sont souvent confondus en un seul document, en tout cas dans les services où j’ai pu évoluer. Or, nous n’attendons pas la même chose d’un.e étudiant.e que d’un.e professionnel.le.
  • Réaliser plus de mises en situation simulées afin de s’entraîner, développer des compétences et des connaissances, mais également apprendre à travailler avec l’équipe en place et bâtir des relations de confiance
    • J’ai eu l’occasion récemment d’aller passer une certification d’Emergency Pediatric Care (Prise en charge pédiatrique d’urgence), avec deux médecins de mon équipe. Voir comment les uns et les autres travaillent, échanger sur les pratiques et voir les évolutions permet de mieux s’adapter lors d’une situation réelle, chacun se connaissant mieux.
  • Individualiser les apprentissages en se basant sur les performances du nouveaux professionnel
    • Cela implique de créer de nouveaux outils de travails, afin d’analyser des données spécifiques et cibler les objectifs à atteindre et ceux déjà atteints.
  • Mettre en place un « Mentor » dans le service, un membre de l’équipe en place depuis quelques temps, à l’aise dans son poste, et capable de pouvoir faire des retours au professionnel suivi.
    • Cela implique de prévoir des journées ou des temps dédiés uniquement à l’apprentissage et au feed-back, à l’analyse des données recueillies.
    • Cela vient d’être mis en place dans mon propre service, et je pense que cela va être une évolution incroyable dans l’encadrement des nouveaux arrivants, en plus de créer des liens forts au sein de l’équipe.

Dans un but de toujours évoluer et apprendre, j’ai également enchaîné avec la formation ACLS (Advanced Cardiovascular Life Support) et j’ai été frappé par la simplicité avec laquelle nous avons pu nous entraîner.

Pas besoin d’un mannequin haute fidélité, un mannequin « standard », avec possibilité de masser / intuber, une tablette/logiciel et nous étions lancés.

Le formateur pouvait à tout moment faire évoluer les constantes sur le scope depuis sa propre tablette, nous pouvions lui poser des questions sur l’état du patient en développant nos « ABCDE » (un article est à paraître prochainement sur ce sujet) et cela nous permettait de faire des liens.

Une utilisation dans un service, lors de journées formation avec des scénarios préparés à l’avance pourrait permettre aux professionnels d’apprendre à travailler ensemble et de réduire les craintes et appréhensions des uns et des autres.

Cela permet également d’apporter plus de connaissances et de compétences, afin de construire une base solide.

Pour conclure

Je ne suis infirmier que depuis un peu plus de 3 ans, et j’ai pourtant l’impression que cela fait au moins le double. Apprendre, évoluer, découvrir, il y a énormément de possibilités pour le nouveau professionnel, qui peut se retrouver parfois perdu lors de son arrivée dans un nouveau service.

La technologie a eu des impacts majeurs dans nos vies au cours de ces années et dans la formation en soins infirmiers, l’utilisation de la simulation peut accroître la capacité des étudiants en sciences infirmières à voir plus rapidement la situation dans son ensemble. Cela comprend la mise en place de signes et de symptômes subtils qui, pris isolément, peuvent ne pas sembler nocifs, mais lorsqu’ils sont reconstitués, permettent aux prestataires d’intervenir rapidement.

Nous avons l’obligation de bien préparer la prochaine génération d’infirmier.e.s afin qu’ils/elles aient les compétences nécessaires pour prendre soin d’une population de patients de plus en plus complexe.

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